mardi 8 mars 2016

Les baboushka sous les feux de la rampe

La première agence de mannequins seniors ouvre en Russie


Igor Gavar, un jeune photographe originaire d’Omsk en Sibérie occidentale, a ouvert la première agence de mannequins pour les plus de 55 ans.


L’agence est dediée aux plus de 55 ans mais des modèles plus jeunes sont également acceptés. «L’essentiel repose sur le charisme, le style, les traits du visage et les cheveux blancs qui montrent que la personne est âgée» a expliqué Igor au cyberjournal Sib.fm. L’agence compte déjà 7 modèles : 5 femmes et 2 hommes âgés de 62 à 78 ans.

Cette agence est le fruit de 5 ans de travail. Igor photographie des personnes âgées et publie leur portrait sur son blog «Oldushka» ( en français "ma vieille chérie") depuis 2011. Peu à peu les medias se sont intéressés à son blog. «Des journaux m’ont contacté pour engager mes modèles dans des campagnes publicitaires. La première fois remonte à décembre 2014 pour Afisha. Je crois que c’était la première fois dans l’histoire de la presse papier qu’on montrait des modèles âgées et inconnues» a déclaré le jeune photographe.

Igor Gavar est le premier en Russie à s’intéresser au look des seniors.  «Quand il s’agit d’originalité, les personnes âgées sont beaucoup plus intéressantes que les jeunes. S’habiller de façon originale représente un réel engagement pour le troisième âge russe. Ces personnes ont vécu la majeure partie de leur vie sous l’Union soviétique où les vêtements devaient être pratiques et modestes», a-t-il expliqué.


Son projet «Oldushka» a gagné en popularité avec plusieurs expositions à travers le pays notamment «Le troisième âge» à Moscou et «Voici les babushka!» au musée d’arts visuels d’Omsk. Plusieurs modèles d’Igor sont apparus dans des séries télévisées, des clips de musique ou encore les campagnes publicitaires d’Afisha, Sony, Buro 24/7 et Bosco Magazine. 

Campagne publicitaire de Sony, 2015 avec au centre Victor, 73 ans et Lioudmila, 70 ans.


Modèle du blog Oldushka, Nina Andreevna, 70 ans, comptable

Valentina Nikolaevna, 75 ans, ancienne gardienne d'hôtel dans une station balnéaire

Irina, 75 ans
Dilara, 73 ans

Олдушка
Valeria Nikolaevna, 75 ans

Олдушка
Andreï Viktorovitch, 72 ans
Олдушка
Nadejda Dmitrievna, 62 ans

Russia, terza età con stile: ritratti 'rubati' in strada


mercredi 2 mars 2016

La vraie vie dans les appartements communautaires soviétiques. Mémoires de la camarade Lioudmila.

Lioudmila Vadimovna a grandi dans le cœur de Moscou, dans un immeuble de type stalinien c'est-à-dire construit sous le régime de Staline et avec une hauteur de plafond de 3m20. Comme des millions de citoyens sous l’Union Soviétique, Lioudmila partageait sa chambre avec ses parents et sa grand-mère  dans un grand appartement communautaire où logeaient 5 autres familles. Les chambres étaient très spacieuses, le papier peint de très haute qualité avec des dorures « qu’aujourd’hui on ne sait plus faire ». Dans l’appartement de Lioudmila cohabitaient des familles avec des enfants de tous les âges, deux grand-mères retraitées et un colonel qui aimait beaucoup l’alcool et qui de temps à autre se faisait grondé par les grands-mères. Tout ce petit monde avait un rythme différent et il n’y avait donc aucune dispute pour la salle de bain le matin. Lioudmila ne garde d’ailleurs que de très bons souvenirs de cette période de sa vie. 

A ses yeux, les années 1950 et 1960 représentent les plus belles années de l’Union Soviétique, car les gens étaient alors plus heureux, moins envieux les uns des autres, la vie était plus simple et plus agréable. « Dans mon quartier tout le monde se connaissait et tout le monde se disait bonjour. Personne n’enviait personne. A quoi bon ?! Nous avions tous les mêmes appartements, le même nombre de mètres carrés par famille, les mêmes meubles, les mêmes cartes de rationnement… Tout le monde avait un travail à la sortie de l’université et tout le monde mangeait convenablement. Non, non, on ne manquait vraiment de rien.»

Cette époque, si particulière et étrangère à l’ouest, est profondément marquée par la complicité, le partage, la bonne entente et la simplicité. Lioudmila était la plus jeune des enfants de son appartement et cela n’empêchait pas ses voisines de presque 8 ans ses aînées de l’emmener se promener avec elles. «J’étais toute petite, j’avais 6 ou 7 ans. Elles m’emmenaient partout avec elles. J’adorais me balader avec elles. Elles utilisaient un code entre elles pour parler des garçons qui leur plaisaient pour que je ne sache pas de quoi elles parlaient et que je ne répète rien aux adultes le soir. Mais je savais bien qu’elles parlaient de garçons. A chaque fois j’essayais de déchiffrer leur code.» Comme dans tous les appartements communautaires, les familles qui vivaient dans l’appartement de Lioudmila avaient pour tradition de passer les fêtes et leurs weekends ensemble, autour d’une grande table. 

Quelques années après la mort de Staline, en 1956, on commence à parler de reloger certaines familles dans des appartements individuels. Dans un premier temps, cela concerne les familles les plus nombreuses. Celles qui habitaient avec Lioudmila n’en faisaient pas partie, et ce n’est que plus tard, dans les années 1960, qu’on leur a proposé de quitter leurs chambres respectives pour des appartements individuels et/ou de l’argent. «Lorsqu’on a commencé à nous parler de la dissolution des kommounalki et du relogement des familles dans des appartements individuels, nous ne voulions pas nous quitter. Une très bonne amie d’école ne voulait pas non plus quitter les familles avec lesquelles elle vivait. Elle me disait : tu comprends, les baboushki veillent sur nous, elles s’occupent de la maison, il y en a toujours une qui décroche le téléphone quand je dois laisser un message à ma mère pour lui dire que je rentrerai plus tard. On s’entend très bien, on a toujours vécu tous ensemble, on ne veut pas se quitter.» Mais, comme le regrette Lioudmila, l’argent a séparé des millions de familles comme celles-ci. 
L’argent que ces familles se sont vu proposer pour accepter de déménager dans un appartement séparé, la plupart du temps plus loin du centre ville. L’argent qui avait commencé à remplir les poches de certains malins qui ont su profiter du désordre général qui a régné les années qui ont suivi la chute de l’URSS. L’argent qui a petit à petit changé les mentalités, miné ce que ces gens avaient de plus précieux: la complicité, le partage, l’entre-aide, la bonne entente, la confiance. «Petit à petit, les gens ont cessé de se dire bonjour. On se méfiait les uns des autres. On était devenus des étrangers aux yeux de nos voisins.» D’ailleurs, Lioudmila confesse aujourd’hui qu’elle regrette que sa famille ait quitté leur chambre si tôt car «on aurait pu la vendre beaucoup plus cher si seulement on avait attendu quelques années». 

Cette méfiance entre voisins est restée, et aujourd’hui, des familles qui ont vécu sur le même pallier des dizaines d’années et vu plusieurs générations apparaître les unes après les autres, se méfient les unes des autres et craignent à chaque instant que les voisins les dénoncent aux impôts ou à la police. Ces craintes n’ont aucune raison d’être, mais les gens ont simplement et incroyablement peur les uns des autres. La première chose que l’on vous dit quand vous emménagez dans votre propre appartement, c’est «de ne jamais ouvrir la porte à qui que ce soit, sous aucun prétexte.» Si vous montez dans l’ascenseur avec un de vos voisins, que vous l’ayez déjà vu ou non, que vous lui ayez déjà arraché un petit bonjour ou non, il attendra probablement que vous appuyiez sur votre étage en premier et, seulement une fois que vous serez sorti de l’ascenseur, il appuiera sur son étage, si forte est sa peur que vous sachiez à quel étage il habite.

Depuis que sa famille a été relogée dans deux appartements séparés, Lioudmila est repassée plusieurs fois devant la kommounalka de son enfance. «C’est toujours un moment de grande nostalgie, beaucoup d’émotions me reviennent, tant de souvenirs!» Une fois, je suis passée et j’ai vu que c’était à vendre, puis ça a été acheté en un seul lot (toutes les pièces par le même acheteur). Quelques mois plus tard, c’était en travaux puis à nouveau à vendre. Cela doit être un appartement superbe maintenant, vue sur le fleuve et l’hôtel Ukraine (une des sept tours stalienne de Moscou), un des plus beaux et des plus riches quartiers de la ville, à deux pas de la Maison Blanche, le siège du gouvernement. Quand je repense à notre cuisine, ce n’était pas une cuisine, c’était une cantine! Elle était tellement spacieuse que j’aurais pu y ouvrir un restaurant.» plaisante Lioudmila. Ses yeux brillent, sont visage entier s’illumine et quand elle ne sourit pas elle rit aux éclats. Durant les deux heures de notre entretien, pas un moment son visage ne se crispe ou se durcie lorsqu’elle décrit chaque recoin de son appartement et raconte chaque anecdote. 
«Bien sûr on faisait du troc! Chaque citoyen avait le droit à une bouteille de vodka par mois sur sa carte de rationnement, même les enfants. On ne buvait pas dans notre famille. Un jour, j’ai rencontré une dame près du métro qui vendait de la viande. Malheureusement elle venait de vendre son dernier lot mais elle m’a confié que le cuisinier de l’université revendait une partie de son stock de viande au noir. Je me suis réjouie qu’on ait gardé toutes ces bouteilles de vodka à la maison, elles allaient enfin servir. Je les ai donc toutes cachées sous un chiffon dans mon sac de courses et je suis allée graisser la patte du cuisinier de l’université. On ne manquait de rien à l'époque (époque de la Perestroika). C’était juste un bon échange qui arrangeait tout le monde.»

On nous a peint un bien mauvais portrait de l’URSS en Europe, parfois monté de toutes pièces. On a diabolisé à l’extrême et à tord un pays où des millions de gens vivaient absolument normalement, comme vous et moi. Venez donc voir par vous-même. Venez vous intéresser à ces gens, discuter avec eux et découvrir ce qui se passait vraiment au quotidien sous l’URSS.

Je ne compte plus le nombre de personnes que j’ai rencontrées ici en Russie et qui regrettent cette période de leur vie. Tous ceux que j’ai rencontrés et qui, comme Lioudmila, ont partagé des appartements communautaires sous l’URSS, sont submergés par la nostalgie lorsqu’ils racontent leur vie à cette époque. 
Comment peut-on imaginer que cette entre-aide et cette complicité reviennent dans les coutumes dans un monde toujours plus rongé par le capitalisme, l’argent et l’individualité? Plusieurs générations de russes ont déjà grandi dans la méfiance constante de l’autre. 

Dans le village de Kolomna, dans la banlieue de Moscou, une partie d'une Kommounalka a été restaurée et sert de musée.


Le fameux frigo "Zil Moskva" avec verrou pour éviter les vols.

Au musée de la Kommounalka les visiteurs sont libres de porter les vêtements d'époque laissés par les anciens résidents et de se mettre dans leur peau. 

La salle de bain commune faisait aussi office de studio de développement de photos.

Poudre à dentifrice pour enfants.

La bibliothèque qu'un des résident acceptait gentiment de partager avec ses colocataires et les fameuses énormes conserves.

Machine à laver soviétique, fabriquée à Riga.

L'uniforme traditionnel des petites soviétiques pour le premier jour de la rentrée en première classe de primaire.

Boudoir typique de l'époque soviétique. Toutes les femmes avaient le même parfum: le parfum "Moscou rouge".

Le parfum "Moscou rouge" était populaire même à l'étranger et en Europe. C'était un des cadeaux que les soviétiques offraient lors de leurs voyages à l'étranger.

Photo de parade sur la Place Rouge.

Dans le couloir traînaient des piles de vieux journaux et accessoirement des armes.

Sport d'hiver très populaire partout en Russie: le patin à glace.

Dans l'entrée.

Vue du couloir.

mardi 23 février 2016

Династия царев Романовых началась с браком царя и простолюденки

Михаил I Фёдорович Романов, первый царь из династии Романовых, женился на простолюдинке. 

Евдокия Лукьяновна была выбрана овдовевшим царем Михаилом Фёдоровичем на смотре невест, устроенном в 1626 году. Однако стоит отметить, что она не входила в число отобранных 200 красавиц царства, а прибыла с одной из них. Она была наперсницей, то есть подругой для бесед, своей двоюродной сестры, которая являлась кандидаткой. По легенде, царь Михаил Фёдорович не смог выбрать невесту во время смотра из-за того, что у всех кандидаток были однотипные лица: невыразительные. Поэтому он решил со своеё матерью посмотреть на красавиц, когда они будут спать, чтобы увидеть их естественную внешность. Той ночью он заметил одну красавицу и выбрал её. Но на самом деле молодая женщина не входила в число  кандидаток. Царь выбрал сопровождающую подругу одной из девушек, думая что она кандидатка. Но все были рады что тридцатилетний царь наконец-то женился.
От этого брака родились 9 детей и создалась династия Романовых которая правила Россию до февральской революции в 1917. 


Смотр невест, 1626

mercredi 3 février 2016

La gazéification des habitations en Russie

Dans un pays recouvert par plusieurs mètres de neige 4 à 6 mois par an (cela varie selon les régions), il fait bon d'avoir de quoi se chauffer et qui plus est à un prix abordable.
Cela tombe bien, la Russie abrite les plus grandes réserves de gaz naturel au monde, et donc quoi de plus naturel pour les Russes que d'utiliser leur ressource si abondante?

В стране со снеженым покровом от 4 до 6 месяцев в год (в зависимости от регионов), необходимо иметь хорошее и недогогое отопление. Хорошо, что у России самые большие газовые запасы в мире. Поэтому неудивительно, что большинство Россиян пользуются этим богатым ресурсом.











De tels paysages à première vue peuvent choquer, mais il y a une explication à ce paysage défiguré.
Les tuyaux permettant l'acheminement du gaz aux habitations peuvent être enterrés mais cette option a un coût non négligeable et c'est pourquoi beaucoup de foyers russes préfèrent se chauffer au détriment de la beauté du paysage environnant. Il faut savoir que le creusage, la mise en place et l'entretien des tuyaux sous terrains est en moyenne 60% plus cher que si les tuyaux ne sont pas enterrés. Non seulement les tuyaux sous terrains sont plus chers, mais ils ont également un débit en gaz plus faible et un entretien plus complexe et plus coûteux (il faut creuser et déterrer les tuyaux avec attention pour pouvoir les réparer).
 De plus, les compagnies d'installation du chauffage au gaz refusent automatiquement la pose des tuyaux sous terrains si 1) le sol autour du logement contient des éléments corrosifs et donc qui endommageront les tuyaux ou 2) si la distance entre le logement et le réservoir de gaz est trop grande. En effet plus le logement est loin du réservoir, plus il devient difficile voire même impossible d'obtenir des autorisations de creuser sous des autoroutes, des parcs naturels protégés, d'autres habitations etc.

Картина может шокировать, но есть объяснение того, почему пеизаж столь безобразен. Трубопроводы по которым осуществляется транспортировка газа в дома можно закапать в землю но это стоит дороже. Многим семьям недоступна такая возможность и вследствие их дома отапливаются в ущерб красоте округающего пеизажа. Стоит отметить, что прокладка и техническое обслуживание подземных в среднем стоит на 60% больше. Их пропускнаяспособность меньше, и их техническое обслуживание сложнее и дороже 5чтобы выполнить ремонт, надо выкопать проводы).
К тому же, компании предлагающие услуги по установке газового отопления отказываются от подземных труб если 1) почва вокруг дома содержит разъедающие вещества, которые будут разрушать трубы или 2) если расстояние между домом и резервуаром газа слишком большое. Ведь чем дальше дом находится от резервуара, тем труднее, а иногда и невозможно, получить разрешение на проведение земельных работ под автомагистралями, заповедниками и другими объектами.

Après le choc, l'accoutumance.
После шока - привыкание.


D'après Alexander Merzlov, directeur du département du développement durable à l'université d'agriculture de Timiryazev, le véritable danger de ces installations extérieures est l'accoutumance des habitants à ce nouveau type de paysage. Selon lui, les jeunes russes qui ont grandit au milieu de ces labyrinthes ont assimilés ces tuyaux au paysage traditionnel et ont développé un nouveau standard de beauté. Il y a donc un risque réel que lorsqu'ils intégreront la vie active ces jeunes encouragent la construction de ces installations. 

Le paysage porte la traces des générations qui nous ont précédé et influence particulièrement notre qualité de vie. C'est aussi un héritage que nous laissons à nos enfants. La Russie s'étant sur 7 fuseaux horaires et deux continents; la richesse et la diversité de ses paysages est unique. Aujourd'hui la mondialisation a changé la face de beaucoup de pays, défiguré leurs paysages pour le confort facile, rapide et bon marché du plus grand nombre. Hélas, cela n'épargne pas le paysage traditionnel russe. Comme dans les autres pays émergents, les nouvelles constructions poussent comme des champignons, les villes s'étendent de plus en plus, la population a soif de modernité et malheureusement les maisons traditionnelles russes, les "izba", disparaissent du paysage. Alexander Merzlov est propriétaire d'une maison de campagne traditionnelle russe ("datcha") dans la périphérie de Moscou. Il se rappelle qu'il y a 10 ans son quartier comprenait 54 autres "datcha", aujourd'hui elles ne sont plus que 7, la sienne inclue. Les datcha ont fait place à d'énormes villas à plusieurs étages, les façades en bois ont été remplacées par du béton. 




По мнению Александра Мерзлова, директор Центра устойчивого развития сельских территорий государственного аграрного университета им. Тимирязева, настоящая опосность этих надземных труб - привыкание жителей к этому новому пейзажу. По его словам, молодые россияне, выросшие среди этих лабиринтов, приравняли эти трубы к русскому традиционному пейзажу и создали новый стандарт красоты. Существует реальный риск, что, когда поколение придёт на рынок труда, оно будет одобреть и повторять строительство таких газопроводов.

Voici quelques exemples de maisons de campagne traditionnelles russes, "datcha":



J'ai eu l'occasion de visiter une de ces nouvelles villas qui sont bien-sur très confortables, spacieuses et bien isolées, mais ce weekend-là je me suis sentie très loin de la Russie, dans une villa du sud de la France, sans la mer. Heureusement, j'ai aussi eu la chance de passer quelques jours dans une véritable datcha, sans eau courante, avec un "bania" tout en bois à la place d'une salle de bain classique. Evidemment, au début j'ai un peu regretté la douche de mon appartement...mais très vite je me suis habituée à faire chauffer mon bac d'eau sur le feu de cheminée, à sortir au bout du jardin au milieu de la nuit car les toilettes ne sont pas dans la maison mais dans une petite maison en bois séparée de la maison principale. Je ne dis pas qu'il ne faut pas profiter du progrès et ne pas avoir son petit confort, on peut très bien mettre une douche, un évier et des toilettes dans une datcha, mais il n'est pas nécessaire de bâtir des villas sur deux étages avec deux salons, des toilettes et une salle de bain par chambre et une chambre par personne, le tout recouvert de béton. Ça n'a aucun charme, aucune âme et certainement aucune identité.
Un autre phénomène que l'on observe depuis quelques années dans la banlieue des grandes villes de Russie est la construction de nouveaux quartiers avec des noms très attractifs tels que "La petite Suisse", "American Dream", "Benelux", "Dolce Vita". Pour attirer les consommateurs, les constructeurs immobiliers non seulement construisent des villas de style européen ou américain mais nomme également les quartiers avec des noms étrangers. Que reste t-il donc de l'identité russe? Pourquoi s'efforcer de ressembler à l'Europe et aux Etats-Unis alors que la Russie a une identité à elle? Pourquoi ne pas nommer ces nouveaux quartiers "La petite Karélie", "Le petit Altai", ou encore "Le petit Caucase"? Les montagnes de l'Altai et le lac Baikal n'ont rien à envier aux Alpes suisses ou au lac de Côme. 




Quelques exemples de maisons tradtionnelles russes, "izba":





jeudi 28 janvier 2016

Les Soviets, précurseurs de la coloc'


Les kommounalki sont les appartements communautaires soviétiques dans lesquels logeaient plusieurs familles en même temps. Chaque famille avait sa chambre et les parties communes comprenaient la cuisine, le couloir, les toilettes et le balcon où chaque famille avait son évier, son four, ses casseroles, ses étagères, son rouleau de papier toilette... Ces appartements ont vu le jour dès l'arrivée des bolchéviques au pouvoir et aujourd'hui on estime qu'il n'en reste que 1%. En effet, après la chute de l'URSS, bon nombre de citoyens vendirent la chambre qu'ils habitaient pour emménager dans leur propre appartement. Certains, contraints par leurs colocataires, ne parvinrent pas à vendre leur chambre et durent se contenter de la louer. La nouvelle possibilité de vendre ou de louer ces chambres donna lieu à de nombreuses et longues disputes entre voisins. Pour tous ceux qui ont grandi en Europe de l'ouest, la kommounalka est un concept complètement inconnu et mérite d'être présenté.




La kommounalka, c'est dabord un long couloir, rarement éclairé, regorgeant d'objets tout aussi étranges, magiques et inutiles les uns que les autres. Ce couloir a toute une vie et plusieurs générations y ont laissés leurs traces: des luges cassées parent les murs, des récipients énormes remplis de liquides douteux font plier les étagères, des boîtes de jouets cassés prennent la poussière dans un coin, des armoires pleines de vêtements jamais portés empestent le renfermé, des paires de chaussures incomplètes s'entassent  avec des pelotes de laine et des câbles gardés "au cas où", des vélos d'enfants. Les petits pilotes se lancent dans le couloir comme sur une piste de course automobile, à toute vitesse...Bienvenue dans la kommounalka-type sous l'URSS! Entrez, et fermez vite la porte derrière vous, on ne sait pas ce que les voisins pourraient raconter...



Un tas de chambres bordent ce long couloir exigü qui donnent sur la cuisine et les toilettes que se partagent plusieurs familles. Chaque matin, c'est le même rituel: une vingtaine de personnes se disputent les seules toilettes de l'appartement. Les familles se partagent aussi le téléphone, encrassé par toutes ces mains poisseuses et ces oreilles huileuses. Les murs sont recouverts d'étagères qui croulent sous le poids de livres que personne n'a jamais lus. La porte d'entrée est placardée de notes sur lesquelles figurent les noms des familles occupant l'appartement et les instructions correspondantes: "Ivanov: sonnez trois fois", "Kazakov: frappez fort une fois" ou encore "Lazarev: sonnez deux fois longuement puis une fois rapidement." Dans les toilettes trône une pancarte avec un rappel: "Camarades! N'oubliez pas que vous ne vivez pas seuls! Des gens attendent leur tour!"



Le plus souvent les résidents vivent en bonne entente, s'entraident, se confient leurs enfants à tour de rôle, passent leur temps libre et leurs weekends ensemble; la cuisine sert de salon où l'on discute de tout et de rien. Les jours de fête réunissent tout le "petit" monde autour de la table et autant d'années de cohabitation transforment tous ces voisins en une grande famille où tous partagent les mêmes problèmes, les mêmes passe-temps et les mêmes intérêts.



Les problèmes, la saleté et les cafards occupent tous les esprits et toutes les cuisines. On entend les pas des voisins au travers des murs. Mais comme on dit: "plus on est de fous plus on rit!" Le plus souvent on ne se bat que contre les voisins "éternels," comprenez ici les cafards.
Les cafards c'est toute une histoire. En vérité c'est une véritable invasion. Ils sont partout et il y en a de toutes les sortes: des petits, des gros, des très gros, avec des ailes, des rouges, des noirs... La nuit on les entend galoper sur le parquet, sous les lits, sur les murs. On peut même les apercevoir le long des fenêtres à la lumière des lampadaires. On les traque désespérément, on pose toutes sortes de pièges dans tous les recoins, on en coince quelques uns mais inévitablement la relève contre-attaque. Alors on se lance à leur poursuite, chausson à la main, prêt à les écraser avant qu'ils ne rejoignent leur campement, en vain. Toujours vaincus, les résidents n'ont d'autre choix que de se résoudre à cohabiter avec ces locataires indésirables.




Autre défaite des résidents des kommounalki: la vie privée. Il n'y a tout simplement pas de place pour ça. Chacun connait la vie de ses voisins sous toutes les coutures: leur linge (eh oui dans les kommounalki on lave son linge sale dans la cuisine...), leurs amants, leurs repas, leurs dettes et leurs maladies. Tout le monde dort au rythme de la perquisition de l'un et de la colique de l'autre!

Kommounalka sous l'URSS

Kommounalka de nos jours
Kommounalka de nos jours